Séance n°54

Séance n°54 – 17 septembre 2024

Jeu n°1 —

Continuer le récit :

Nous regardions tranquillement notre émission favorite. Soudain, le présentateur, habituellement si jovial, reçut un message dans son oreillette. Son visage s’est aussitôt fermé, avant qu’il ne quitte le plateau en courant. Puis, ce fut la panique parmi les spectateurs. Et l’écran devint noir.

Les textes :

Nous nous sommes regardés, interloqués. J’allais dire quelque chose lorsqu’on entendit un brouhaha venant de dehors. Les rideaux écartés, nous découvrîmes une scène de chaos total ; cris, hurlements, vitrines brisées, voitures renversées, incendies divers.
— On fait quoi ? me dit-elle.
— Je… ne sais pas. On devrait peut-être rester à l’abri ici et…
Des coups violents ébranlèrent la porte de l’appartement. Sans nous concerter, d’un commun accord, nous nous précipitâmes vers la fenêtre.
En serrant les mâchoires de peur, nous parvînmes à longer la corniche de l’immeuble jusqu’à l’escalier de secours, et nous pûmes rejoindre la rue.
Il nous restait à trouver un abri sûr, en évitant le danger. Celui-ci, d’ailleurs, restait impossible à identifier. Mais pour le moment, nous ne cherchions qu’à nous sauver.
En traversant la rue, nous sommes rentrés dans un groupe de gens en fuite également. Revenu de notre stupeur, je leur demandais :
— Mais, il se passe quoi ? Qu’est-ce que vous fuyez ?
Mon interlocuteur, un monsieur entre deux âges qui ressemblait à un comptable paniqué, me regarda comme si j’étais un extra-terrestre, avant de me répondre :
— Heu. En fait je sais pas trop…
Il se retourna et cria à la cantonade :
— Quelqu’un sait ce qui se passe ?
Un silence tout aussi dérangeant que le chaos précédent lui répondit, suivi par des marmonnements timides et penauds :
— Heu…
— Je sais pas…
— J’ai juste suivi…
Après un instant de flottement, tout le monde retourna chez lui, tout confus.

Vincent

Jeu n°2 —

Écrire un dialogue entre deux personnes. L’une tente de demander quelque chose à l’autre (un objet, un service…) mais il ne peut pas prononcer ni décrire directement le sujet.

Les textes :

— Oh, collègue, comment tu vas ?
— Rhaa, Thomas, tu sais que j’aime pas quand tu m’appelles collègue. On dirait un cliché de marseillais.
— En même temps, c’est cool, non ?
— Pas du tout, d’autant que tu n’es absolument pas marseillais.
— D’accord, Quentin, on s’en fout. J’ai un truc à te demander.
— Balance…
— Je dois bouger ce weekend, alors est-ce que je pourrais te demander de t’en occuper ?
— M’occuper de quoi ?
— On va à Serre-Ponçon avec Nathalie.
— Super, content pour vous, mais…
— Alors t’es d’accord ? Je te file les clés demain.
— Les clés de ?
— Ben la maison.
— Purée, je comprends rien. C’est quoi ce plan ?
— Ben, comme on sera parti, tu passes samedi et dimanche, vers midi. On rentrera tard, je pense.
— Passer pour quoi ?
— Ben comme je t’ai dit…
— T’as rien dit, et je vais péter un plomb !
— … tu passes t’en occuper. Tu lui changes l’eau, et tu lui parles un peu. — À qui ?
— Qui quoi ?
— À qui tu veux que je parle ? C’est quoi ? Un chat ? Un chien ? T’as adopté un orphelin ? Ou alors c’est ta belle-mère sénile qui stocke chez vous ?
— Mais de quoi tu parles ?… Faut que tu arroses mon zamioculcas.
— Ton quoi ?
— C’est une plante verte. Un cadeau de maman.
— Je me demande, au final, si t’as pas des bouts d’ADN marseillais, finalement…

Vincent

Jeu n°3 —

Un participant va choisir un livre dans la librairie. On se sert de l’illustration de couverture pour en tirer une histoire.

La couverture :

Le livre maudit d’Azrael

« [Le livre maudit d’Azrael (Gods and Monsters, tome 1)(https://www.babelio.com/livres/Nicole-Gods-and-Monsters-tome-1–Le-livre-maudit-dAzrae/1444361)] » de Amber Nicole, éditions MxM Bookmark.

Les textes :

— Entre ici, mortel, et perd tout espoir…

La voix parvenait à être à la fois diablement sexy et terriblement lugubre. En d’autres termes, elle me mettait le feu au bas-ventre et des glaçons dans le dos. Mais, bon, comme c’était si gentiment imposé, j’entrais.

La pièce était plongée dans l’obscurité, mais je pouvais deviner une décoration assez particulière, à base de toiles d’araignée, de colonnades gothiques et autres statuettes aux formes indicibles et non euclidiennes. Au centre, face à moi, se trouvait une femme assise sur un trône composé pour l’essentiel de crânes de différentes tailles, dont la plupart n’étaient pas de proportions humaines. Rien n’allait dans ce que je voyais. Elle était vêtue d’une soyeuse robe rouge sanguin, échancrée là où il fallait au point que j’étais prêt à parier qu’elle soit tombée si elle se levait. Heureusement pour ma vertu, elle se contentait de me scruter d’un regard noir comme un coup de Rimmel.

— Heu. Bonjour ?

Ma plus belle entrée en matière, y’a pas photo.

— Approche, ma victime de la nuit. Je veux ton âme.

J’hésitais un instant, les mains dans les poches.

— Heu. À vrai dire, je ne préfèrerai pas.

Ma réponse n’eut pas l’air de lui plaire. Elle claqua des doigts et une flamme vive se mit à danser dans la paume de sa main.

— Insolent ! Je vais te réduire en cendres et je vais me repaître de ton essence de vie.

— C’est cool comme tour, votre truc de flamme. C’est un hologramme ?

Je la vis se crisper, prête à se jeter sur moi. Ce que dans d’autres circonstances, je n’aurai pas refusé.

— Bon, fis-je pour combler le silence gênant qui était en train de s’installer. Je vais y aller, moi, hein ?

— Tu n’iras nulle part ! Tu es ma chose.

— Je crois que vous vous trompez, madame. Vous n’avez aucune chance de piquer mon âme, parce que je n’en ai plus.

— Plait-il ?

— Je suis influenceur sur les réseaux sociaux.

— Malédiction ! hurla-t-elle. Encore un !

Elle disparut dans un nuage méphitique et carmin qui se dissipa alors que résonnaient en écho ses derniers mots :

Soyez maudit !

— Oui ben, merci, mais c’est déjà un peu fait.

Vincent